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Par : pboue
Publié : 3 octobre 2009
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Icare ou la chute de la conscience

Danse - Toulouse - quartier des Minimes

Du sol au soleil il n’y a qu’un pas : un pas de danse...un petit pas pour l’homme ?

Atelier du mouvement, quartier des Minimes, Toulouse, automne 1998. Icare ou la chute de la conscience.

Révélation à Toulouse, cité de l’envol par excellence. Icare, revisité, traduit dans la sculpture vivante, dans la mise en danse de la pesanteur et de l’extase. C’est dans le combat intérieur de l’homme, dans la lutte permanente de l’ange contre la bête que P.C. Durouchoux et C. Vergnes ont choisi de puiser leur inspiration. C’est à une danse de l’homme total qu’ils nous convient. Interrogation déchirante et mise à nu de la tragi-comédie humaine qui tente de s’arracher à sa lourde condition.

On pense d’abord à un récit, à une illustration du mythe avec une entrée dans sa genèse : l’homme édénique qui, tel Orphée, parle le langage des oiseaux, dans la pure alchimie et l’âge d’or de l’enfance ; la fête de tous les sens, la franche gaieté d’une volière mystique, la guillerette insouciance de l’ange, oiseau de paradis puis la chute brutale, l’incarnation humaine - ou la réincarnation - la peur criante des signes célestes, des colères atmosphériques harcelant l’être aux pieds d’argile s’engluant dans la boue de la réalité, grimaçant, cherchant la meilleure attitude à adopter dans un monde labyrinthique où il est étranger, vulnérable, "veule et laid" comme l’albatros baudelairien. La quête pathétique des gestes originels et de la sérénité perdue, les contorsions innombrables et maladroites, ridicules, grotesques. Le rire déchirant l’espace tel un hoquet nerveux, souffrance et défi à la volonté divine qui l’a réduit là à ramper pour subsister. L’orgueil naissant, la fierté retrouvée de l’homme vertical, de celui qui se dresse douloureusement, refusant l’écrasement et la perte de la liberté, aérienne. Les balbutiements, les esquisses avant la conquête de l’air, triomphante, chorégraphique et acrobatique.

Nostalgie de la plume qui s’éloigne lentement car il faut trouver d’autres moyens d’évasion et d’extase.

Envolée victorieuse au-delà des limites pesantes de l’humanité qui s’accomplit à travers les arts du mouvement.

On pense aussi à Birdy ce personnage d’Alan Parker écartelé entre la réalité et son désir d’ascension, d’émancipation de son enveloppe humaine.

Tout cela comme un récit mais il serait superflu de rendre compte ainsi du langage corporel dans cette création originale. Tout ici est vécu, allégorique, pensé avec le corps, les pas, les gestes. C’est l’essence même de la danse qui trouve ici sa pleine expression et transfigure le mythe d’Icare dans un cri silencieux, dans un déroulement subtil, senti et émouvant de vrilles gestuelles et de paraboles rythmées. Comme une musique du corps qui nous rappelle notre dualité fondamentale, ce grand écart entre le rêve de l’envol et le poids trivial de la réalité.

N’est-ce pas là au fond la fonction poétique de tout art : communiquer des émotions, provoquer la pensée, l’interrogation ?

"Icare ou la chute de la conscience" devient une formule d’éveil, chargée de désespoir, de béatitude et d’espoir renouvelé : l’homme cherchera toujours à recréer l’âge d’or, d’accéder à la pleine lucidité de l’extase dont parle Camus..

A travers le mythe d’Icare c’est la création toute entière qui est visée. Créer c’est voler au-dessus des limites, accomplir le bondissement de la plume même rêvée, ce n’est donc pas un hasard si le mythe de l’homme-oiseau a nourri l’imaginaire des artistes de toutes les époques, dans tous les domaines et dans la plupart des courants artistiques comme nos lecteurs internautiques pourront le constater en visitant ce site qui cherche à éclairer notre imaginaire et à stimuler notre intellect quelque peu désorientés dans le dédale du savoir démesurément élargi par les technologies modernes et la dynamique des hommes de bonne volonté.

PCB