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Par : pagictice
Publié : 25 décembre 2007
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Défense et illustration de l’oeuvre de René Daumal :

DAUMAL, UN AUTEUR POUR LA JEUNESSE ?

Défense et illustration de l’oeuvre de René Daumal :

DAUMAL, UN AUTEUR POUR LA JEUNESSE ?

(ce texte fait partie d’un livre illustré format demi-raisin dont l’unique exemplaire fut présenté en novembre/décembre 1994 au C.D.I. du Lycée Chanzy de Charleville-Mézières, à l’occasion des “Aubades en Ardennes” consacrées à Daumal et au Grand Jeu, puis au Collège de Lauzerte en juin 1995, enrichi de nouvelles réalisations d’élèves)

Que les puristes daumaliens veuillent bien nous pardonner d’avoir livré - ou délivré ? - Daumal aux yeux de la jeunesse. Ce ne fut pourtant pas chose aisée. Quel était donc cet auteur issu du néant qui se substituait aux grands classiques ? Les programmes n’en glissaient pas un mot... quant aux manuels scolaires, ils s’évertuaient à déformer la réalité ou à la décomposer en tranches aseptisées.

Pourtant, au fil du temps, quelques textes daumaliens firent leur apparition et les adolescents purent progressivement découvrir et apprécier une partie de son oeuvre - mais surtout des oeuvres “intégrales” (- ou presque ! - comme Le Mont Analogue ou La Grande Beuverie).

Bien sûr, regretteront les puristes, Daumal risque de “finir” dans les manuels d’histoire littéraire après avoir annoncé à Breton que le Surréalisme subirait ce sort. Qu’importe, il faut être deux pour faire vivre l’oeuvre... Repères, balises, jalons et veilleurs sont assez nombreux pour que les jeunes marcheurs ne s’égarent pas en route.

L’intérêt du “partage” de l’oeuvre symboliquement authentique de Daumal nous paraît résider dans la richesse de ses prolongements. C’est une voie ouverte plus qu’un enseignement, orientant le regard plus que donnant la vue, pour citer Platon. C’est une voie ouverte au questionnement et non pas aux réponses toutes faites.

Concrètement, elle nous a paru ouvrir les portes de la responsabilisation et du sens de la solidarité de chacun - qui s’exprime clairement dans l’ascension du Mont Analogue et dans la pratique de nombreux sports, y compris l’escalade. Elle fut une invitation à l’auto-documentation (notamment par l’intermédiaire du laboratoire de Sogol, vaste éventail des connaissances humaines), à l’argumentation et à une “construction” du savoir - et non plus à une superposition ni à un quelconque psittacisme (Daumal n’a-t-il pas commenté la fameuse formule de Montaigne “Science sans conscience n’est que ruine de l’âme” ?).

Dans la pratique de l’étude des oeuvres, ce qui nous frappa ce fut la fraîcheur de la lecture de ces adolescents qui trouvaient eux-mêmes des ouvertures, dressaient des hypothèses de lecture qu’ils validaient ensuite. La finalisation - ou la socialisation - des différents itinéraires de lecture par le texte et l’image (illustrations et jaquettes) est ici un moyen pratiquement inédit de mettre en valeur, concrètement, leur propre regard de lecteur actif, et de restituer, dans une certaine mesure, par le travail de la création, la saveur de cette parole “pleine”.

Et si l’on ne peut affirmer qu’ils auront épuisé les sens de l’oeuvre, c’est tant mieux. C’est le signe de sa vitalité. On ne pourra les accuser de sacrilège ni même de superficialité et ... “Il reste tant de choses à faire pour vivre”...

Pascal Boué, Collège de L. ( septembre 1994)